Les effets du régime cétogène sur la santé
Résumé
Le régime cétogène ou « keto » est une approche nutritionnelle utilisée depuis près d’un siècle dans certains contextes. Il suscite aujourd’hui un fort engouement pour ses effets sur le poids, l’énergie et la concentration. Cet article explique comment l’alimentation cétogène modifie en profondeur le métabolisme énergétique , quels sont ses effets sur l’organisme, les aliments autorisés ou interdits, ses bénéfices et les précautions à prendre. Nous verrons aussi si le régime cétogène présente des dangers réels.
Le régime cétogène c'est quoi ?
Définition et principes de base
Le régime cétogène repose sur une réduction drastique de l’ apport en glucides au profit des lipides dans le but d’entraîner un changement du métabolisme énergétique. En l’absence d‘un apport de glucose suffisant, le corps puise dans les réserves de graisses et produit des corps cétoniques qui deviennent alors la principale source d’énergie . Pour cela, il est nécessaire que l’alimentation soit composée d’un ratio élevé de lipides (environ 70 à 80 % de l’apport calorique) et de limiter drastiquement les glucides, sous la barre des 50 g par jour. L’apport en protéines reste le même que dans les autres modes alimentaires. Le corps entre alors dans un état de cétose nutritionnelle (distinct de la cétose pathologique). Le métabolisme s’adapte naturellement à cette disponibilité réduite de sucre pour fonctionner efficacement avec des graisses.
Origines historiques et évolution moderne
Historiquement, l’alimentation cétogène existe naturellement chez les êtres humains pendant les périodes d’hiver où existe un manque de ressources végétales . Les peuples vivant sur des étendues de glace, tels que les Inuits, ont eu, traditionnellement, un régime cétogène permanent. Leur source de glucides et de fibres provenant uniquement des algues et du contenu des estomacs des herbivores. Le régime cétogène est apparu dans les pays industrialisés au début du XXe siècle, d’abord à des fins médicales, puis son usage s’est élargi à des objectifs de gestion du poids et de bien-être à partir des années 2000.
Comparaison avec d’autres approches low-carb
L’essor du régime cétogène apparaît au sein d’un mouvement plus large de remise en question des régimes riches en glucides et en sucres ajoutés. Il se décline aujourd’hui en plusieurs variantes adaptant les ratios de macronutriments pour répondre à une demande non médicale. Ces modifications affectent pourtant son efficacité. On ne parle plus alors de régime cétogène, mais de régime low-carb , soit pauvre en glucides.
Les approches low-carb permettent souvent une consommation de 100 à 150 g de glucides par jour, tandis que le régime cétogène impose une restriction plus stricte avec une proportion de lipides bien plus élevée. Des régimes comme le paléo ou l’Atkins peuvent ponctuellement approcher un profil cétogène, mais ne respectent pas l'équilibre métabolique précis qui permet le maintien des lipides comme source d’énergie utilisée par l’organisme à moyen ou long terme.
Fondements physiologiques
En l’absence d’apport glucidique, l’organisme cesse progressivement de produire de l’énergie via la glycolyse , pour activer la voie de la cétogenèse. Cette transition demande entre deux et sept jours selon les individus. C’est le même phénomène qui se produit lors du jeûne. Durant cette période, le glycogène hépatique est épuisé, et le foie commence à transformer les acides gras en corps cétoniques. Ces derniers deviennent alors le substrat énergétique principal des cellules.
Le foie génère les corps cétoniques à partir du gras de l’alimentation ou des tissus adipeux . Ce processus est activé par la baisse de l’insuline et l’élévation du glucagon qui survient lors d’un apport très restreint en glucide. Le foie exporte les corps cétoniques qu’il produit vers les organes périphériques.
Le paysage hormonal est totalement réorganisé en l’absence de glucide. L’inversion des rapport insuline/glucagon existant dans les régimes riches en glucides modifie le métabolisme énergétique. La chute du taux d’insuline favorise la libération des acides gras et l’augmentation du glucagon stimule la cétogenèse. La leptine, hormone de la satiété, tend à être mieux régulée, ce qui réduit la sensation de faim.
Alimentation cétogène en détail
Répartition optimale des macronutriments et ratio cétogène
L’alimentation cétogène repose généralement sur un ratio de 3:1 ou 4:1, c’est à dire que 70 à 80 % des calories proviennent alors des graisses. Le reste de l’alimentation est composé de 15 à 25 % des protéines, et moins de 10 % des glucides . Ce ratio doit être adapté aux besoins spécifiques de chacun : un sportif n’aura pas les mêmes besoins en protéines qu’un sédentaire. L’apport en protéines ne doit pas dépasser les besoins, au risque de perturber la cétose par néoglucogenèse. Aussi, l’apport en fibre doit être suffisant pour permettre une digestion saine.
Aliments à privilégier
L’assiette cétogène se compose principalement de lipides de qualité tels que les huiles vierges, l’avocat, les poissons gras, les oléagineux, ainsi que des graisses animales de qualité. Les protéines proviennent d’œufs, de volailles, de viandes et de fromages. Les légumes pauvres en glucides sont essentiels pour leurs apports en micronutriments et fibres (épinards, brocolis, courgettes, champignons, etc). Les herbes aromatiques et certaines épices permettent de faire varier la cuisine sans ajout de glucides.
Des graisses animales de qualité
Les graisses animales ayant un bon profil en acide gras sont rares dans le système agricole moderne. Les animaux élevés en plein air, nourris majoritairement à l’herbe et au fourrage biologique sont les seuls qui fournissent des graisses équilibrées en acides gras (rapport oméga 3/6) et pauvres en pesticides. En effet, les graisses animales accumulent les pesticides présents dans leur alimentation.
Aliments à éviter
Tous les sucres, même naturels, sont exclus de l’alimentation cétogène. Aucun miel, sirops, ni fruits riches en fructose ne sont tolérés. Les amidons (sucres lents) comme les pâtes, le riz, le pain, les pommes de terre, et même les légumineuses sont quasiment absents. Les produits ultra-transformés, riches en additifs et glucides cachés ( maltodextrine , dextrose, etc.), doivent également être écartés. Une lecture attentive des étiquettes est essentielle pour éviter les produits contenant des sucres ajoutés.
Exemple de journée type
Le matin : œufs brouillés au beurre, avocat, thé non sucré.
Le midi : salade de roquette, saumon grillé, huile d’olive, quelques noix.
Collation : olives.
Le soir : poêlée de courgettes aux champignons, ailes de poulet, huile de coco.
Boisson : eau, infusions sans sucre ou bouillon.
Bienfaits sur l’organisme
H3 Gestion du poids
Le régime cétogène favorise la perte de poids chez de nombreuses personnes. À la source de cet effet se trouve la satiété naturellement induite par le régime cétogène. Une diminution spontanée des apports caloriques se fait généralement après quelques jours, mais la mobilisation des graisses comme carburant entraîne aussi une réduction du tissu adipeux plus rapide en cas de réduction calorique. L’alimentation cétogène limite également les pics glycémiques responsables des fringales qui peuvent être à l’origine d’un surpoids. À moyen terme, un rééquilibrage du rapport masse grasse / masse maigre est fréquent, à condition de maintenir un apport protéique suffisant et adapté.
Amélioration des marqueurs métaboliques
L’alimentation cétogène contribue à une régulation efficace de la glycémie grâce à la suppression des glucides rapides et au changement de fonctionnement de l’organisme. Le profil lipidique s’améliore également 1 . On observe dans les études une augmentation du HDL ( bon cholestérol ). Certains sujets voient leur LDL (cholestérol total) augmenter, mais les facteurs de risque associés aux déséquilibres métaboliques semblent diminuer.
Effets sur les fonctions cognitives
L’un des intérêts majeurs de la cétose est sa capacité à fournir une énergie stable au cerveau . Contrairement au glucose, les corps cétoniques ne provoquent pas de variations brutales d’énergie. Ils sont distribués en continu, ce qui favorise une meilleure concentration, une clarté mentale accrue et une réduction de la fatigue cognitive . Les études rapportent une amélioration de la mémoire 2 et de l’attention 3 pendant et à la suite d’un régime cétogène. Ces effets semblent liés à l’efficacité métabolique accrue des neurones nourris par les cétones.
Dangers du régime cétogène
Effets secondaires
L’adaptation au régime cétogène peut s’accompagner d’ inconforts transitoires r egroupés sous le terme de « keto flu ». Les symptômes incluent fatigue, maux de tête, nausées, troubles digestifs et/ou hypoglycémie légère. Ils disparaissent en quelques jours avec une bonne hydratation, un apport suffisant en électrolytes (sodium, potassium, magnésium). Une transition alimentaire progressive est préférable pour éviter ces troubles.
Carences nutritionnelles potentielles
La restriction de fruits, céréales et légumineuses peut entraîner un déficit en vitamines B, C et K, ainsi qu’en polyphénols et en fibres. Il est essentiel d’intégrer suffisamment de légumes verts, herbes fraîches et noix, et d’accompagner le régime d’un complément multivitaminé si nécessaire. L’apport de fibres doit atteindre 25 à 30 grammes par jour pour prévenir la constipation et maintenir la santé du microbiote intestinal.
Complications à long terme
Sur le long terme, certaines études montrent des impacts sur les fonctions rénales , hépatiques ou cardiovasculaires 4 . Ces effets sont largement dépendants de la qualité des aliments consommés et apparaissent généralement en raison d’un excès de lipides de mauvaise qualité ou d’une surcharge protéique. Un régime cétogène bien formulé, riche en bons gras et en végétaux, avec un apport de protéines suffisant, mais pas excessif, montre des résultats positifs dans des études sur le long terme 5 . Une personnalisation et un suivi médical sont préférables pour une alimentation cétogène sans danger.
L’alimentation cétogène pro-inflammatoire ?
Selon une publication de l’Inserm en 2019 6 , le bêta-hydroxybutyrate (principal corps cétonique) active certaines voies inflammatoires. Cette étude menée sur des cellules isolées ne représente pourtant pas les résultats obtenus sur les organismes entiers. En effet, l’utilisation de l’alimentation cétogène dans les études sur l’animal et l’être humain montre une diminution des marqueurs de l’inflammation, dont TNF-α et IL-6 7 . Les mécanismes biologiques sous-jacents aux bénéfices apportés par le régime cétogène ne sont pas encore élucidés, mais il a fait ses preuves.
Contre-indications
Certaines conditions métaboliques ou situations physiologiques rendent le régime cétogène inadapté sans suivi médical. Il est déconseillé chez les personnes atteintes de déficit en carnitine-palmitoyl-transférase , de pancréatite , d’insuffisance hépatique ou rénale sévère, ainsi que chez la femme enceinte ou allaitante, sauf avis médical contraire.